les trois chevaliers

L'obscurité approchait lorsque les trois chevaliers s'approchèrent des abords du village, les sabots de leurs chevaux frappant les poutres du pont, lisses comme la pluie. Au-dessous d'eux, la rivière écumait, gonflée par les récentes pluies qui avaient dévalé l e s flancs des Montagnes Grises. La route passait à l'intérieur d'une palissade en bois mal construite et la lumière des lampes de derrière les fenêtres à volets jetait des faisceaux de lumière sur leur chemin. L'air était chargé d'une odeur de fumée de bois. Une pancarte en bois clouée à une guérite vide au bout du pont proclamait que le village s'appelait Gugarde. Un bien vilain nom pour une bien vilaine ville, pensa Luc Massone alors que lui et s e s deux compagnons franchissaient la porte brisée qui menait à la ville. Luc savait que les villes bretonnes n'étaient jamais des endroits très esthétiques dans le meilleur des cas, mais il s'agissait d'u n exemple particulièrement choquant. Les domaines de son père, au sud de Couronne, étaient bien plus attrayants à l'œil. Luc était u n h o m m e puissamment bâti, avec une épaisse crinière de cheveux noirs et un visage sombre et séduisant. Une longue cicatrice blanche p a r t a i t de sa tempe droite jusqu'au menton, lui donnant une expression cruelle et sardonique. Alors qu'ils s'enfonçaient dans la ville, il savait qu'ils é t a i e n t surveillés. Des éclats de lumière furtifs, lorsque les rideaux en lambeaux étaient écartés derrière les fenêtres à barreaux, l e lui indiquaient. Luc savait que trois chevaliers en armure à cheval ne passeraient pas inaperçus dans une petite ville sordide comme celle- ci. Cet endroit pue la peur", dit Fontaine, le second frère de Luc, qui chevauche à sa gauche. Ils suspendent de l'a c o n i t et de la racine de démon au-dessus de leurs portes. Peut-être que les histoires étaient vraies. Luc sourit en entendant la pointe d'impatience dans la voix de Fontaine. Je ne vous l'avais pas dit, répondit Luc, nous trouverons bientôt les ténébreux, j'en suis sûr. Le mal comme le leur ne meurt pas facilement. Alors, sommes-nous assez nombreux ? demande Belmonde, le plus jeune frère de Luc. Si les marcheurs de la nuit sont vraiment revenus, n'aurions-nous pas dû être plus nombreux ? Luc soupire d'exaspération devant la bêtise de Belmonde. Son frère n'apprendrait jamais. Et si nous amenions une armée et détruisions leur donjon pierre par pierre, cela ferait-il de toi un chevalier ? Où serait l 'honneur ? Comment prouverais-tu ta virilité à ton père avec une horde de paysans hurlants dans ton dos ? Non, si nous devons faire cela, nous devons l e faire seuls. Ce n'est qu'ainsi que tu pourras devenir un chevalier du royaume comme je le suis Belmonde, dûment châtié, ne répondit pas. Luc arrêta s o n cheval devant un bâtiment au toit bas, d'o ù émanait une odeur odieuse d e corps non lavés et de légumes bouillis. Au-dessus de la porte, une pancarte défraîchie représentait une gravure grossière d'un château aux multiples tourelles, sous laquelle étaient gravés les mots " Le Manoir ". Luc rit de l'inopportunité du nom, tandis que les frères descendent de cheval et attachent leur monture à l'unique barre d'attache de l'auberge, tandis que Belmonde fait de même avec leur mule. Jetant un regard désagréable sur l'établissement, Luc et s e s frères s'aventurèrent à l'intérieur. L'ENCENS de l'auberge est une chose presque physique, qui englobe tout et qui domine. La sueur du dur labeur, la mauvaise nourriture et la bière éventée se mêlaient en un arôme âcre qui lui restait en travers de la gorge. L'auberge était étonnamment pleine et, de façon remarquable, aucun des clients du bar ne leva les yeux vers les chevaliers. Un barman à l'air revêche était assis derrière un t r é t e a u au fond de la salle et l'agacement de Luc montait à mesure qu'il les traversait. Ces paysans ne se rendaient-ils pas compte de l'honneur qu'il leur faisait en daignant entrer dans leur établissement puant ? Il tira une pièce d'or d'une bourse accrochée à la ceinture de son épée et la déposa sur le bar. Il y a trois chevaux et une mule à l'extérieur. Veillez à ce qu'ils soient n o u r r i s , abreuvés et logés convenablement pour la nuit. Les yeux de l'aubergiste s'écarquillèrent à la vue de la pièce, plus riche que ce qu'il aurait normalement vu en un an, et il la saisit dans son poing charnu. Ses yeux se promenèrent avec méfiance dans la pièce, craignant que d'autres personnes ne s'aperçoivent de sa soudaine bonne fortune. Il sourit et aboya : "Antoine ! Déplace ta carcasse sans valeur et emmène les chevaux des seigneurs à l'écurie ! D é p ê c h e z - v o u s ! En guise de réponse, un jeune à l'air pressé sortit rapidement de l'auberge. Nous aurons également besoin de chambres, de nourriture et de vin", poursuit Luc. Il laissa tomber une nouvelle pièce sur le bar en bois, dont le bruit fit tourner les têtes dans toute l'auberge. L'aubergiste ramassa la seconde pièce aussi vite que la première. Vous aurez ce qu'il y a de mieux, mes seigneurs, dit l'homme. Le meilleur de toute la Bretonnie ! J'en doute u n peu, répondit Luc, mais faites ce que vous pouvez. Il lui tourna le dos et se dirigea vers une table vide près de la fenêtre. Les conversations, jusque-là discrètes, cessèrent complètement et chaque homme dans le bar regarda sa chope comme s'il était fasciné par son contenu. Luc, murmura Belmonde avec insistance, sais-tu c o m b i e n tu as donné à cet homme ? Bien sûr, répondit Luc, ce n'est que de l'argent, et un chevalier breton n'a pas besoin d'argent. Fontaine sourit, croyant comprendre les intentions de son frère, et dit : "Oui, il faut toujours être prêt à aider les plus faibles". des ordres. Tu dois l' apprendre, Belmonde, si tu veux participer à la quête des frères Massone...". Le silence remplit le vide laissé par les paroles de Fontaine et il s'efforce de dissimuler sa colère car personne dans le bar n'a mordu à l'hameçon de sa déclaration. Belmonde, comprenant enfin la vaine théâtralité de son frère, dit : " Oui, Fontaine. Pour détruire les diaboliques buveurs de sang qui habitent le Donjon du Sang, nous devons être fidèles aux vœux que nous avons prononcés dans la chapelle de la Dame à Couronne. Nous devons... Ses paroles s'interrompent devant le regard fixe de Luc. Ignorant le mécontentement de Luc, Fontaine poursuivit : "En effet, mon frère. Car telle est notre quête, combattre les créatures de la nuit qui tourmentent ces nobles gens, qui amènent leurs enfants à Blood Keep et les vident de leurs âmes. Affronter les vampires ! Fontaine s'assit sur sa chaise, un sourire d'autosatisfaction se dessinant aux coins de sa bouche. Athroat s'installa à une table près de la cheminée et son sourire s'élargit lorsqu'une voix âgée commença à parler. Si vous vous rendez vraiment au Blood Keep, vous êtes encore plus stupide que vous n'en avez l'air. Le sourire de Fontaine disparut et il se leva d'un bond, le visage écarlate et la main portée à la poignée de son épée. En un c l i n d'œil, la lame se retrouva dans sa main. Qui ose insulter mon honneur ?" rugit-il en balayant du regard l a foule méfiante. Une seule paire d'yeux se leva pour rencontrer ceux de Fontaine. Un homme courbé par l'âge et le labeur, à la peau usée et coriace, dont les yeux, malgré les ravages du temps et de l'alcool, étaient clairs et bleus, hantés par une sagesse qui démentait son apparence. La détermination de Fontaine faiblit lorsqu'il croisa le regard du vieil homme, mais sa fierté ne lui permettait pas de reculer maintenant. Il tint l' épée sous la gorge du vieil homme et dit : "Si tu étais un adversaire digne de ce nom, je te provoquerais en duel, mais je suis un homme d'honneur et je ne frapperai pas un homme aussi vénérable". Mais je suis un homme d'honneur et j e ne frapperai pas quelqu'un d'aussi vénérable. L'homme haussa les épaules, comme si la question n'avait p a s d'importance, et dit : "Tu es fou de penser que tu peux vaincre les Chevaliers de Sang. Ce sont des guerriers hors p a i r . Je le sais. J'étais dans les rangs lorsque le duc de Montfort les a combattus à Gisoreux. C'était un grand homme, mais les vampires l'ont abattu comme un enfant. Luc se lève et abaisse doucement le bras armé de Fontaine. Je suis aussi un guerrier de grande renommée, vieil homme, commença Luc. À Kislev, on m'appelait Droyaska - bladémaster - et dans l e s terres du Nord, les bêtes du Chaos me connaissent sous le nom de "Celui qui marche avec la Mort". Ce sont les rôdeurs de la nuit qui doivent se méfier de moi. Fontaine fit tourner son épée, la rengaina d'un seul geste et s'assit tandis que Luc se tenait devant la silhouette vieillissante. Le vieil homme fixa Luc de son regard perçant, p l o n g e a n t s e s yeux dans ceux du jeune chevalier. Il se pencha vers l'avant et chuchota : " Tu as une fierté féroce, mon garçon. Je le vois bien, mais ne te rends pas au Donjon du Sang. Si vous le faites, v o u s mourrez tous. Je ne peux pas être plus clair que c e l a . Tenez compte de mon avertissement, quittez cet endroit et ne revenez pas. Luc sourit et tourne le dos au vieil homme, s'adressant aux clients du bar : "Sachez que les gens d e . . . Gugarde, murmura Fontaine. Gugarde, poursuivit Luc avec douceur. Nous partons demain pour Blood Keep et les vampires. Que l'on se souvienne de mon nom est une récompense suffisante. Son discours terminé, Luc tourna les talons et se dirigea vers les escaliers menant aux étages supérieurs. L'aubergiste ! aboya-t-il. Montrez-nous nos chambres et j'exige que vous nous apportiez les meilleurs vins que vous possédez. Une fine brume planait sur la route boueuse tandis que les trois chevaliers conduisaient leurs chevaux de l'obscurité de l'écurie à la faible lumière du soleil matinal. Luc attacha à nouveau son hongre noir à la barre d'attelage et sortit son épée de son fourreau huilé. Il se dirigea vers le centre de la route, balançant son arme en arcs de cercle faciles autour de son corps, relâchant les muscles de ses épaules. Il ralentit sa respiration et tint la lame devant lui, les quillons au niveau de son visage. Soudain, il s'élança, tournoyant et se tordant, la lame formant un arc d'argent qui tournoyait en u n e toile scintillante devant le chevalier. Le travail de Luc était impeccable, chaque mouvement parfaitement équilibré et contrôlé. Couper, pousser, parer et riposter, l'épée de Luc est devenue une extension de sa chair. Il termina ses exercices par une dernière coupe à hauteur du cou, fit tourner l'arme par son pommeau et la rengaina. Luc retourne à son cheval et examine les pattes et les sabots de la bête. Le garçon d'écurie, Antoine, avait manifestement pris soin d u cheval. Ses flancs étaient propres et soignés et la selle en cuir avait reçu une nouvelle couche d'huile. Il s'accroupit à côté du hongre et resserra la sangle de la selle avant de monter sur le dos du cheval. Il regarda les montagnes s'élever et sentit un frisson d'anticipation l' envahir. Il était si proche de son but qu'il pouvait presque le goûter. Au-dessus de l u i , la forteresse noircie du Donjon du Sang l'attendait. Toutes ses années de quête et de combat l'avaient mené jusqu'i c i et, maintenant qu'il y était, il était légèrement amusé de constater qu'un tremblement de peur se mêlait à son excitation. Se montrerait-il à la hauteur ? Presque aussitôt qu'il eut formulé cette pensée, il se reprocha son manque de foi. N' avait-il pas combattu les ennemis les plus puissants et ne les avait-il pas vaincus ? La vraie question devrait être de savoir si cette quête était digne de l u i . Il se tordit en selle pour s'assurer que ses frères étaient prêts et vit le jeune garçon, Antoine, debout près de la porte de l'écurie, jetant des regards pleins d'espoir aux guerriers en armure. Luc fouilla dans sa bourse et en sortit une pièce de cuivre qu'il lança en direction du jeune garçon. Le garçon s'avança en courant et attrapa la pièce, s'approchant avec hésitation de Luc. Il sourit nerveusement, dévoilant des moignons jaunis de dents cassées. Monsieur le chevalier ? commença-t-il. Luc se renfrogne. Je n'ai plus de pièces pour toi, mon garçon. Non, monsieur, dit le garçon en secouant la tête, je ne veux plus de votre argent. 'Vraiment?' Vraiment, dit Antoine. Je veux venir avec vous pour combattre les vampires. Luc rit et lui tape sur la cuisse avec hilarité : "Tu veux t e battre contre les vampires, mon garçon ? Quel âge a s - t u ? Je ne suis pas sûr, monsieur le chevalier. Je pense qu'il y en a peut- être treize. Je peux être votre écuyer. Je peux porter des choses et je peux cuisiner et nettoyer des épées et d'autres choses. S'il vous plaît ? Il faut plus que cela pour devenir écuyer, dit Luc d'un ton sévère. Des années d'entraînement, un esprit noble et un bon héritage. P e u x - t u ê t r e à la hauteur ? Antoine baisse la tête et marmonne : "Je connais a u s s i un raccourci par les montagnes jusqu'au donjon". L'intérêt de Luc fut soudain piqué. Il vit que le garçon était au bord des larmes à l'idée d'être abandonné et soupira. Il n'avait pas besoin de cela, surtout maintenant. Mais si le garçon connaissait u n chemin plus rapide à travers les montagnes, alors il pourrait peut-être être utile après tout. Très bien, dit Luc, tu peux monter la mule et tu feras exactement ce que je dis quand je le dis. Si tu me mécontentes ne serait-ce qu'une fois, je te renvoie ici. Tu m' a s bien compris ? Antoine acquiesce avec enthousiasme : "Oui, monsieur ! Oui, monsieur ! Vous ne l e regretterez pas, je vous le promets". J'ai intérêt à ne pas l'être", grogne Luc d'u n e voix qu'il espère redoutable. Fontaine approcha son cheval de Luc et lui dit à voix basse : "Luc, es- tu sûr de t o i ? Voulons-nous vraiment que ce garçon voyage avec n o u s ? Nous ne pourrons pas le protéger correctement si nous partons au combat. Luc acquiesce. Le garçon prétend connaître un raccourci à travers les montagnes. Je vais le laisser nous conduire jusqu'au col, puis le laisser repartir. Il ne courra aucun danger et je veillerai sur lui si les choses tournent mal. Tu t'inquiètes trop, Fontaine. Nous sommes sur le chemin de la gloire, mon frère. Aie la foi. Fontaine haussa les épaules : "C'est toi qui sais le mieux, Luc". Oui, acquiesce Luc, c 'est vrai. Maintenant, v i e n s , je veux aller le plus loin possible dans les montagnes avant qu'il ne fasse nuit. Même si l e raccourci du garçon est authentique, je ne pense pas que n o u s atteindrons Blood Keep avant la tombée de la nuit, mais je veux être sûr que nous y arriverons pendant qu'il fera jour le jour suivant. Luc posa ses éperons sur l e flanc du cheval et le petit groupe se dirigea vers le nord le long de la rue boueuse, Antoine se balançant sur le dos de la mule de bât. À la sortie du village, près du cimetière, le groupe passa devant un petit sanctuaire mal entretenu dédié à la Dame du Lac. Quelques fleurs et un tas de grains moisis étaient les seules offrandes dans l'alcôve et les trois chevaliers inclinèrent la tête en passant. Au-dessus d'eux, un oiseau charognard tournoyait, les ailes noires déployées contre la lumière du soleil. LA LUMIÈRE DU SOLEIL a brûlé la brume au bout d'une heure et le terrain a commencé à devenir nettement plus escarpé. La journée s'était réchauffée et Luc retira son casque. Il faisait chaud maintenant, mais il savait qu'une fois qu'ils auraient grimpé plus haut dans les montagnes, la température chuterait rapidement. Le raccourci qu'Antoine leur avait indiqué leur avait fait gagner près de sept miles et Luc était de bonne humeur. L'air était clair et Luc respirait profondément, appréciant le sentiment de liberté qu'il ressentait soudain. La matinée se passa sans encombre, le chemin de montagne leur permettant de gagner du temps. Les kilomètres furent parcourus rapidement, mais les chevaux étaient fatigués et Luc interrompit leur ascension lorsque le soleil atteignit son zénith. Antoine marcha et nourrit les chevaux pendant que les chevaliers se reposaient et mangeaient un repas léger d e pain noir et de fromage accompagné d'une bouteille de vin estalien. Luc s'adossa à un rocher et contempla l e s montagnes enneigées, dont les sommets étaient enveloppés de nuages gris et fantomatiques. Séparant la Bretonnie des terres païennes de l 'Empire, les Montagnes Grises le surplombaient. Blood Keep était niché dans un étroit col qui reliait les deux terres et avait autrefois été une puissante forteresse, abritant un noble ordre d e chevaliers guerriers qui protégeaient les terres environnantes contre tout danger. Les chevaliers étaient réputés pour leur honneur et leurs talents martiaux, et la seule vue de leur bannière suffisait à j e t e r un froid dans l'esprit des serviteurs du mal. La légende raconte qu'un jour, un guerrier s'est présenté aux portes et a demandé à rejoindre l'ordre. On disait qu'il s'agissait du chevalier sans mort connu sous le nom de Walach, de la famille Harkon, et qu'il avait, en une nuit, infecté l' ordre avec la malédiction du vampirisme. Les chevaliers prirent l 'ancien nom de l'ordre du Dragon de Sang comme le leur et des années de terreur et de carnage se déchaînèrent sur les terres entourant leur forteresse. Il a fallu la puissance combinée de quatre ordres de chevaliers de l'Empire pour s'opposer aux vampires et les repousser dans leur forteresse. Après trois ans de siège, les portes furent enfin percées et le château l i v r é aux flammes. Les chevaliers et les chasseurs de sorcières tuèrent les vampires et l'héritage maléfique de Blood Keep passa à l'histoire. Jusqu'à a u j o u r d 'hui, on croyait que le mal avait été vaincu, mais Luc savait que la lignée vivait toujours. Au fin fond des terres du Chaos, il avait combattu l ' un des chevaliers vampires sans âme et lui avait tranché la tête dans u n combat qui avait failli lui coûter la vie et lui avait laissé une longue cicatrice blanche sur le visage. Luc avait contemplé le visage séraphique du vampire et regardé avec stupéfaction son visage juvénile vieillir de plusieurs siècles en quelques secondes avant de se désintégrer en cendres. L' armure rouge sang du vampire, délicieusement détaillée avec des volutes complexes et des muscles moulés, était tout ce qui restait de la créature. C'était une œuvre d'art et Luc pouvait dire qu'elle était incroyablement ancienne. Le vampire devait avoir des centaines d'années. L e v a m p i r e d e v a i t a v o i r d e s c e n t a i n e s d 'années, et pourtant il ne semblait pas différent du plus jeune frère de Luc, sa jeunesse s'étant prolongée pour l'éternité ! Luc secoua la tête à ce souvenir, se rappelant les sentiments que la mort du vampire avait fait naître en lui. Il termina s o n pain et se leva. Ils se remirent en route et continuèrent à gravir la montagne, l'air devenant de plus en plus froid au fur et à mesure qu'ils s'élevaient vers les sommets. Le soleil tombait derrière eux, baignant la forêt de Loren d'une lueur dorée au fur et à mesure que l a journée avançait. Luc ? dit Fontaine, le tirant de ses pensées. Quoi ? Il se fait tard. Ne devrions-nous pas renvoyer le garçon chez lui ? Luc jeta un coup d'œil à Antoine, maugréant en levant les yeux vers le ciel qui s'assombrissait, et réalisa qu'il était trop tard pour renvoyer le garçon. Non, il devra camper avec nous ce soir. Je le renverrai demain. Il ne peut pas nous suivre là où nous allons. Où allons-nous camper ? Luc scruta l'horizon et aperçut un cercle de rochers déchiquetés à une heure de route en amont. Il désigna l'endroit qu'il avait choisi. Nous allons camper dans les rochers là-bas. La nuit tombait rapidement et il faisait sombre bien avant qu'ils ne arrivèrent au cercle de rochers. Un loup hurla au loin et les chevaliers s'arrêtèrent dans leur ascension. Les chevaux hennirent de peur, les yeux écarquillés et les oreilles plaquées contre leur crâne. Antoine reprit les chevaux lorsqu'ils atteignirent les rochers et Belmonde commença à préparer un feu sous le vent d'un rocher plat. Satisfait que tout aille bien, Luc marcha jusqu'a u bord du camp et fixa le noir d'encre, s e s pensées sur le château au-dessus d'eux et les êtres qui, dit-on, étaient revenus y habiter. La nuit, les montagnes n'ont plus rien à voir. Alors qu'auparavant il pouvait voir à des centaines de kilomètres dans toutes les directions, maintenant il pouvait à peine voir sa main devant son visage. Le feu derrière l u i n ' éclairait qu'une toute petite zone, sa lumière intermittente étant un minuscule îlot d e vie dans l'obscurité de la nuit. Luc retourna auprès du feu, la chaleur réfléchie par le rocher commençant à le réchauffer. Il s'installa sur ses fesses et regarda Antoine déballer une marmite, de la viande hachée, des légumes et de l'avoine dans les sacoches de la mule. Luc réalisa soudain à quel point il a v a i t faim, sa bouche s'emplissant d'eau à l'idée d'un copieux bouillon. Il faut de l'eau pour la marmite", dit Fontaine. Il y a un ruisseau à une vingtaine de mètres par l à . Antoine jeta un coup d'œil craintif dans la direction indiquée par Fontaine, le malaise se lisant sur ses traits. Luc soupira : "Prends une torche dans le feu, mon garçon. Et ne tarde pas, j'ai tellement faim que mon ventre pense que j'ai été égorgé. À contrecœur, Antoine s'empare d'un tison enflammé et se fraye un chemin sur le sol inégal en direction du ruisseau. Les frères ricanent en entendant le garçon jurer lorsqu'il glisse sur les aspérités du sol. Fontaine suivit la torche qui vacillait tandis qu'Antoine se dirigeait vers le ruisseau. Un pressentiment soudain lui fit jeter un coup d'œil en amont de la position du garçon lorsqu'il aperçut un mouvement sinueux à la limite de la lumière de la torche. Il se redressa brusquement et saisit son épée lorsqu'il aperçut d'autres formes obscures avec des charbons ardents en guise d'yeux entourant le garçon. Non !" cria-t-il alors que le premier loup attaquait, un éclair venu des ténèbres avec des crocs et des griffes étincelants. Le garçon eut à peine le temps de crier que les mâchoires du loup géant se refermèrent sur sa tête, lui arrachant le visage dans une gerbe de sang. Des griffes semblables à des couteaux s'enfoncèrent dans sa poitrine, l'ouvrant jusqu'à l'os. Le corps de la créature était brièvement éclairé par la lumière de la torche pendant qu'elle attaquait, la peau et les os pourris luisant à travers la fourrure rongée par la gale. Le corps d'Antoine fut secoué de spasmes tandis qu'il mourait, sa main se r e t o u r n a n t et enfonçant la torche dans le corps du loup. L a chair et la fourrure, mortes depuis longtemps, s'enflammèrent de façon spectaculaire et la torche poussa un hurlement. L'embrasement soudain de la mort du loup projeta un anneau d'illumination plus large et Luc eut un bref aperçu de plus d'une douzaine de loups morts-vivants qui s'approchaient d'eux. Les chevaliers dégainèrent leurs épées, Luc saisissant le bras de Fontaine qui se précipitait à l'aide d'Antoine. Il est mort", s'est-il exclamé. Il n'y a rien que nous puissions faire pour lui maintenant ! Fontaine acquiesça sèchement et se plaça dos à dos avec s e s frères, le feu au centre. La mort d'Antoine est certaine. Tout ce qu'ils pouvaient faire, c'était l e venger et combattre ces chiens diaboliques du mieux qu'ils pouvaient. Leurs chevaux de guerre se cabrèrent et foulèrent le sol tandis que les loups l e s encerclaient, les sabots s'élançant lorsque les bêtes arrivaient à leur portée. L'un d'eux bondit en avant, les mâchoires écartées. Un sabot ferré lui fracassa le crâne d'un seul coup. Ne quitte pas la lumière du feu", cria Luc alors qu'un loup bondissait sur lui. Il esquiva et donna un coup d'épée dans un arc de cercle court et brutal. Sa lame éventra le loup, des entrailles en décomposition s'échappant de l a plaie. La carcasse du loup atterrit sur le feu, faisant jaillir des étincelles et des braises. Des hurlements retentirent tandis que les loups attaquaient en masse. Luc dégaina sa dague et planta la lame entre les mâchoires d ' une autre bête de l'enfer. Celle-ci hurla et roula au loin, déchirant les de sa main. Il esquiva et abattit son épée, décapitant un autre loup. Fontaine tituba sous l'effet du feu, son épaulière arrachée par de puissantes griffes. Il tomba à genoux, les mâchoires d'un loup se refermant sur sa vambraque. L'armure tint bon et Fontaine grogna de douleur lorsque le métal comprima la chair de son avant-bras. Luc donna un coup d e botte à l'attaquant de son frère, sentant ses côtes se briser sous l'impact. Il donna un coup d'épée et une autre bête fut réduite au silence. Luc tira Fontaine à ses pieds et le ramena vers le feu. Belmonde brandit sauvagement son épée et une torche enflammée. Les loups grognent, se méfiant des flammes. Les trois frères se regroupent autour du feu, leur respiration est superficielle et laborieuse. La mule était à terre, hurlant tandis que le sang s'écoulait de son ventre déchiré. Les loups chargèrent à nouveau et se heurtèrent aux défenses d'acier des chevaliers. Les lames acérées étincelaient dans la lumière du feu et le sang éclaboussait les rochers. Luc tranchait et coupait, tuant des loups à chaque coup. Le carnage se poursuivit jusqu'à ce que les premières lueurs froides et grises commencent à se répandre sur les hauts sommets. Avec u n hurlement de défi, les loups se fondirent dans ce qui restait d'obscurité, laissant derrière eux leurs congénères massacrés. Belmonde s'affaissa sur le sol, son armure maculée de sang, le visage marqué par l'épuisement. Fontaine était assis à côté de l u i , e s s u y a n t la lame de son épée sur un loup mort. Comme son frère, il était couvert de sang. Luc regarda le flanc de la montagne, avec un sourire féroce, et leva son épée vers le ciel qui s'éclaircissait. Je suis Luc Massone", a-t-il crié, "et je viens au Blood Keep". Il se tourna vers ses frères et se dirigea vers les chevaux de guerre, dont les flancs se soulevaient et les naseaux étaient dilatés. Les animaux saignaient de nombreuses blessures, mais ils étaient vivants. Ce n'était pas pour rien que les chevaux de guerre bretonniens étaient réputés pour être les meilleures montures de cavalerie de tous les royaumes de l'humanité. Il rengaina son épée et caressa doucement la tête de chaque animal, l e s calmant par des paroles douces. Enfin, il se laissa aller à s'asseoir à côté de ses frères. Bien joué", a-t-il dit. Vous vous êtes bien battus. Je suis fier de vous de vous deux. Pendant de longues secondes, personne ne parle, jusqu'à ce que Belmonde relève la tête. Antoine !" gémit-il, se redressant sur des muscles fatigués et boitant jusqu'à l'endroit où le garçon était mort. Le cadavre brûlé d u loup gisait là où il était tombé, un tas de cendres puantes, le bois du brandon logé dans les restes. Mais il n'y avait aucune trace du garçon, juste une large tache cramoisie sur les rochers. LES FRÈRES se répartirent les provisions de la mule morte et se mirent en route aux premières lueurs de l'aube. Luc savait que Fontaine et Belmonde avaient été ébranlés par l'attaque des loups et il ne pouvait pas l e s en blâmer. Ces bêtes étaient redoutées dans tout l e Vieux Monde, mais Luc avait affronté des horreurs cent fois pires et s'en était sorti. Une meute de loups galeux ne l'empêcherait pas d'accomplir son destin. Le voyage devint plus lent à mesure que le sol devenait plus traître et g l a c é , le chemin disparaissant à mesure qu'ils dépassaient la limite de la neige et que le temps se dégradait rapidement. À plusieurs reprises, les chevaux trébuchèrent sur les rochers glissants et les chevaliers durent mettre pied à terre, conduisant leurs montures sur des corniches couvertes de glace. Tous trois étaient bien emmitouflés dans d'épaisses fourrures, et pourtant le vent leur arrachait la chaleur de leur corps en les transperçant. Les heures passèrent dans une brume blanche, balançant avec épuisement, la température glaciale les privant de leurs forces. Luc ! Il faut faire d e m i - t o u r ", supplie Fontaine, qui s'avance aux côtés de son frère aîné. Luc secoua violemment la tête : "Non ! Nous continuons. Ce n'e s t plus très loin. Vous avez dit cela il y a deux heures. Je sais ce que j'ai dit, b o n sang ! grogne Luc. Nous y sommes presque. Je le sens dans mes os. Nous ne pouvons pas nous arrêter maintenant ! Je ne m'arrêterai pas ! Luc fait avancer sa monture, mettant fin à la discussion. Une autre heure de misère glacée s'écoula avant qu'ils ne franchissent u n e colline enneigée et qu'une vaste forme n'émerge de l a blancheur. Au début, Luc n'était pas sûr de ce qu'il voyait, alors qu'il regardait fixement les nuages blancs qui s'étendaient devant lui. Puis, peu à peu, des formes commencèrent à se détacher du blizzard. Des murs brisés et des bastions percés se détachaient des rochers et émergeaient de la neige. Tourelles défoncées et merlons brisés, tout ce qui restait de la forteresse-monastère en ruine se dressait, immense et boursouflé, comme des dents déchiquetées et noircies. Devant eux s'étendait la carcasse pourrie de ce qui avait été l' une des plus puissantes citadelles de l'Ancien Monde. Des portes éclatées pendaient sur des gonds affaissés et l'air de désolation était palpable. Un sentier solitaire serpentait sur les rochers en direction des portes brisées et les chevaliers dirigeaient leurs montures vers les vestiges du Donjon du Sang. Luc sourit, brisant la glace que la sueur avait formée sur sa peau. Il était arrivé ! Rien ne pouvait plus l'arrêter. Il jeta un coup d'œil à ses frères et son sourire s'effaça, mais en imaginant les récompenses du succès, il mit ces pensées de côté. Je n'aime pas cet endroit", dit Belmonde alors qu'ils pénètrent dans l'ombre froide des murs du donjon. Nous ne devrions pas être ici. Luc ne dit rien, poussant sa monture plus loin sur le chemin. Les murs s'élevaient à près de soixante pieds au-dessus de lui, la maçonnerie noircie par le feu et les débris s'échappant des trous creusés il y a longtemps par les canons de l'Empire. Un frisson p a r c o u r u t Luc lorsqu'il pénétra dans le Donjon de Sang, et même s'il se dit que c ' était le froid, il ne le crut qu'à moitié. Ils se retrouvèrent dans une large cour pavée de granit, des amas de neige s'amoncelant contre les murs. Le vent sifflait à travers les écuries et les appentis autour des murs, une complainte fantomatique aux guerriers qui avaient autrefois occupé cet endroit. Le donjon principal de la forteresse était accroupi contre la paroi rocheuse des montagnes, sa porte principale étant elle aussi brisée. Des trous noircis dans le mur s'ouvraient comme des orbites vides et Luc ne pouvait s'empêcher de penser qu'il était observé. Il tapote doucement les flancs de son cheval. La bête était épuisée et effrayée. Quelque chose dans cet endroit lui faisait dresser les poils et, en regardant autour de lui, il vit que les autres chevaux étaient tout aussi méfiants. Ses frères se placèrent à ses côtés. Luc se tourna vers Fontaine et lui sourit en signe de triomphe. Blood Keep", dit-il. Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? demande Belmonde, en regardant le donjon intérieur. Nous trouvons les vampires", répond Luc en détachant son bouclier de son cheval de guerre. Viens, viens. Ses frères échangèrent un regard inquiet et prirent également leurs boucliers, suivant Luc qui dirigeait son cheval vers le donjon intérieur. Fontaine regarda le ciel tandis que Belmonde attachait les chevaux à un longeron de bois cassé. Il ne voyait pas le soleil et se demandait combien de temps il resterait avant la tombée de la nuit. Les trois frères se tiennent ensemble à la porte et tirent leurs épées. Venez, mes frères, sourit Luc. Les vampires nous attendent. L'obscurité était absolue, comme si la lumière elle-même craignait de s'y aventurer trop profondément. Deux squelettes gisaient à l'intérieur de la porte, affalés contre le mur et serrant toujours des lances rouillées. Luc s'accroupit devant le cadavre le plus proche, déchirant deux Il prit des morceaux de tissu dans sa tunique en lambeaux. Il brisa la hampe de la lance de la sentinelle morte et enroula le tissu autour d'une extrémité, passant l'autre moitié et une partie du tissu à Belmonde. Fontaine sortit un amadou et alluma le tissu sec, la lumière des torches illuminant le passage d'une lueur vacillante. Luc s'élança sans un regard en arrière, avançant dans l e large couloir avec sa torche devant lui. Des m e u r t r i è r e s perçaient le plafond et des boucles de flèches ponctuaient les murs. Luc pouvait imaginer les pertes terribles que les chevaliers de l'Empire avaient dû subir en attaquant dans ce couloir. Le passage se termina par un virage serré à droite, montant un escalier en colimaçon dans les ténèbres. Luc fit passer l'épée dans sa main gauche, sachant que le virage de l'escalier l' empêcherait d'utiliser efficacement l'épée dans sa main droite. Il se glissa l e long du mur extérieur de l'escalier, l'arme tendue devant l u i , ayant appris à utiliser l'une ou l'autre main avec la même habileté meurtrière. Les chevaliers pénétrèrent dans un cloître qui résonnait, l'air était empesté par la puanteur de la décomposition. Des centaines de squelettes jonchaient le sol, regroupés autour d'une double porte en chêne, leurs armures rouillées et leurs os recouverts de la poussière des siècles. Savez-vous où vous allez ? murmura Fontaine nerveusement. Bien s û r , siffle Luc. 'Pour trouver le repaire du vampire.' Alors, ne devrions-nous pas chercher à descendre plutôt qu'à monter ? dit Belmonde. On m'a fait croire que l e s vampires faisaient leur repaire dans des cryptes et des sépulcres souterrains. Luc secoue la tête. C'est dans la salle principale que nous trouverons ces vampires. J'e n suis certain. Ses frères ne semblaient pas convaincus, mais Luc continua avant qu'ils n'aient le temps de le contredire, enjambant avec précaution l e s guerriers squelettiques vers la porte au bout du cloître. La porte était fendue en son centre et il l a poussa, faisant signe à ses frères de le suivre tandis qu'il se glissait dans l a salle principale. La lumière dorée du soleil filtrait à travers de hautes fenêtres, partiellement obstruées par des rideaux de velours pourris, révélant une longue salle de banquet surmontée d'une gigantesque table en bois. Des boucliers et des armures rouge sang tapissaient les murs, sous des lances croisées, des torches éteintes et des tapisseries défraîchies. Belmonde et Luc passèrent d'un côté de la table, Fontaine de l'autre, allumant au passage les torches placées dans les appliques. Leurs bottes blindées résonnaient bruyamment dans la salle déserte. La table est dressée pour boire", dit Belmonde, en faisant un signe de tête vers les gobelets vides placés devant chaque siège. Mais pas de manger", fait remarquer Fontaine. Où sont les assiettes ? Le vampire ne se nourrit pas comme n o u s , mon frère, répondit Luc. Fontaine grimace et s'avance vers la cheminée massive en penchant la tête vers la grille. Il se retourna vers Luc et dit : "Ça sent la fumée de bois, un feu a été allumé ici récemment. Et regardez, il y a du bois fraîchement coupé. Pourquoi les morts-vivants auraient-ils besoin de chaleur ? Luc rejoint son frère devant la cheminée. Il haussa les épaules. Je ne sais pas, Fontaine. Peut-être que d'autres voyageurs sont passés par là récemment". Et se sont arrêtés pour la nuit à Blood Keep ? s'exclama Belmonde. Ils devaient être désespérés. Peut-être", acquiesce Luc, qui observe les fines bandes de lumière qui filtrent dans la salle derrière les rideaux de velours et qui se faufilent lentement sur le sol à mesure que le soleil descend derrière les sommets. Fontaine croisa le regard de Luc et remarqua également la baisse de luminosité. Luc ! s'exclama-t-il, la lumière s'éteint ! Il doit être plus tard que nous le pensions. Il faut quitter cet endroit ! Il est peut-être déjà trop tard pour c e l a ", répond Luc, qui entend le bruissement des ossements secs provenant du cloître qu'ils ont t r a v e r s é et qui remarque des silhouettes en armure enveloppées d'ombre sur l e s balcons au-dessus d'eux. La Dame nous protège", prie Fontaine, tandis que la porte de chêne s ' ouvre et que les squelettes, jusqu'alors sans vie, pénètrent sans relâche dans la salle de banquet, lances et épées brandies devant eux. Pour la Dame ! hurla Belmonde en s' élançant, son épée réduisant le premier squelette en miettes. La poussière se répandit autour des squelettes qui attaquaient. La chair et le sang se battaient contre des os d e s s é c h é s et flétris, l'air s'emplissant du craquement des crânes et des côtes anciens. Luc tailla un squelette en pièces a u niveau de la taille et fracassa son bouclier sur un autre. Fontaine écarta les jambes de son assaillant et lui fracassa le crâne avec l e talon de sa botte. L'épée de Belmonde s'élevait et s'abaissait, la lame étant autant une matraque qu'une arme tranchante. Les guerriers squelettiques ne faisaient pas le poids face aux chevaliers, mais quel que soit le nombre de soldats tués par les frères, il y en avait d'autres pour les remplacer. Lentement mais sûrement, ils furent repoussés vers la cheminée, les ombres au-dessus d'eux observant silencieusement la bataille. Fontaine poussa un cri de douleur lorsqu'une pointe de lance s'enfonça dans son épaule non protégée, là où la plaque d'armure avait été arrachée par les loups. Le coup le déséquilibra et il tomba à genoux. Une épée s'enfonça dans sa tempe, arrachant le casque de sa tête. Sa vision se brouille et le sang c o u l e sur son visage. Fontaine ! s'écrie Belmonde alors que son frère se relève péniblement. Des doigts osseux s'agrippèrent aux poignets de Fontaine, la pression du nombre l'empêchant de se relever. Il rugit tandis que les squelettes le maintenaient au sol, luttant pour libérer son bras armé et donnant des coups de pied désespérés. Il eut un aperçu fugace et horrifié d'une large pointe de lance plongeant vers lui avant qu'elle ne s'enfonce profondément dans son ventre, sous son plastron. Elle l u i déchira le cœur et les poumons, jaillissant de son dos dans un déluge de sang. Ses cris se transformèrent en gargouillis sanglants lorsqu'une hache lui fendit la tête à part. Belmonde abattit l'assassin de son frère en hurlant son refus. Luc était à ses c ô t é s , balayant les morts-vivants de coups d'épée brutaux, mais il était bien trop tard pour Fontaine Massone. Dos au mur, Luc et Belmonde maintenaient les squelettes à distance avec une habileté désespérée, puisant dans des réserves de courage qu'ils ne soupçonnaient pas. Alors qu'il détruisait un autre squelette, Luc sentit sa fureur monter. Ce n'e s t pas ainsi que cela devait se terminer ! Il jeta un coup d'œil vers les balcons sombres et les guerriers qui observaient la bataille furieuse. Lâches !" hurle-t-il en fracassant son bouclier cabossé sur le visage grimaçant d'un autre adversaire. Où est votre honneur ? Je suis Luc Massone et j'ai tué l'un des v ô t r e s ! J'exige que vous descendiez et que vous m'affrontiez ! Presque aussitôt qu'il eut parlé, la horde de squelettes cessa son attaque et fit un seul pas en arrière. La salle é t a i t silencieuse, l'absence soudaine de bruit étant plus troublante que le choc des armes. Belmonde se précipita aux côtés de Fontaine, berçant la tête de son frère mort dans ses bras. Les larmes traçaient des traînées claires dans la poussière qui recouvrait son visage. Oh mon frère, qu'avons-nous fait ? pleura-t-il. Belmonde ! siffla Luc. Mets-toi à côté de moi. Maintenant ! Son frère l'ignora jusqu'à ce que Luc l'attrape par l'épaule et le hisse à ses pieds. Le visage de Belmonde était tordu par le chagrin, son épée tenue mollement à son côté. Luc l u i sourit faiblement. Ne crains rien, mon frère. Tout cela sera bientôt terminé. Il regarda vers les balcons, observant les silhouettes en armure qui s'éclipsaient. Le râle métallique des armures retentit lorsque les guetteurs descendirent dans la salle de banquet, émergeant d'alcôves dissimulées de part et d'autre de la cheminée. Trois puissants guerriers, vêtus d'armures cramoisies d'une facture exquise, se tenaient sans mot dire devant les deux frères. Les Dragons de Sang ne portaient pas de casque, leurs visages pâles et aquilins regardaient les chevaliers épuisés devant eux avec une expression de faible amusement. Chacun d'eux portait une épée noire dont l a surface semblait briller d'une iridescence huileuse. Le chevalier de gauche penche la tête de côté et lève son épée. Vous dites avoir tué un dragon de sang ? dit le vampire. V o u s m e pardonnerez mon scepticisme, j'espère ? Tel un serpent, son épée s'élança vers le cou de Luc. Luc s'était préparé et avait rapidement paré, sa riposte se dirigeant vers l'aine du vampire. Le dragon de sang eut à peine le temps de réagir que son épée s'abattait pour bloquer le coup. Rapide comme l'éclair, Luc changea la direction de son coup et trancha la tête du vampire d'un seul coup. Le dragon de sang bascula en arrière, son corps se réduisant en cendres avant que l'armure ne touche le sol de pierre. Luc remit son épée en position de garde. Quelqu'un d'autre ? demanda-t-il. Le vampire aux cheveux noirs et aux yeux d'un violet profond qui faisait face à Luc jeta un coup d'œil à l'armure vide à côté de lui et dit : "Tu es rapide et habile pour un mortel. Peu de gens en vie auraient pu égratigner Grigorij, et encore moins le tuer. Luc acquiesce. Mon habileté à manier la lame est grande. Le vampire sourit. Où est ton humilité, chevalier ? Tu es arrogant. Ce n'est pas de l'arrogance si c'est la vérité", a souligné Luc. Le dragon de sang rit. Ici, dans ce lieu, tu n'es qu'un enfant parmi tes supérieurs. Je pourrais te tuer en un clin d'œil. Vous ne peut espérer me vaincre. Vous devez l e savoir..." "Je le sais" , acquiesça Luc. Alors pourquoi es-tu ici ? demanda le vampire. Tu n'es pas venu pour me tuer ? Non, admet Luc, tandis que Belmonde regarde son frère avec une fascination horrifiée. Alors pourquoi ? Luc modifie sa prise sur son épée et s'écrie : "Parce que je suis venu rejoindre votre ordre". Sa lame a tranché et le sang a giclé, Luc Massone s'est retourné et a décapité son frère. Le cadavre de Belmonde oscille un court instant, puis s'effondre lentement sur le sol, affalé sur le corps sans vie de Fontaine. Luc fit face au Dragon de Sang et planta l'épée, pointe en avant, sur l'âtre de pierre, le visage enflammé par le regard du vampire. Le sang des innocents est sur mes mains et je suis un guerrier hors pair. Où puis-je trouver mon égal dans le monde des mortels ? siffla Luc. Je vous apporte cette offrande de ma chair et de mon sang comme preuve de mon désir. Je suis l'un des vôtres et j'exige que vous m'accordiez le privilège de l'immortalité ! L'excitation est palpable dans ses veines. La peau de Luc rougit, sa cicatrice traverse son visage d'un blanc livide. C'était fait. Il avait atteint le point où toutes les lois mortelles cessaient de le lier. Il allait devenir l'un des éternels vivants, destiné à ne jamais mourir, à devenir le plus grand guerrier de l'époque ! Le dragon de sang regarda le sang s'écouler du cou de Belmonde et haussa les sourcils, perplexe. Demande...", dit-il comme s'il n'avait jamais entendu ce mot. Oui, grogna Luc. C'est mon droit. Je l e mérite. Le chevalier vampire grimaça, dévoilant des crocs aiguisés comme des lames de rasoir. Très bien, tu auras ce que tu mérites, promit-il. LE VILLAGE DE GUGARDE résonne de cris de douleur et de peur. Des chevaux sombres aux yeux rouges transportant des chevaliers en armure cramoisie arpentaient les rues. Personne n'avait vraiment cru les trois chevaliers qui s'étaient vantés d'avoir vaincu les vampires de Blood Keep lorsqu'ils avaient traversé le village il y a six mois, mais q u e l q u e s cœurs avaient peut-être gardé une petite lueur d'espoir. Cet espoir n'était plus que cendres dans le vent, alors que des squelettes en armure noire traînaient les habitants hurlants de leur lit jusqu'à l'abattoir. Les chevaliers riaient tandis que les paysans agitaient inefficacement des fagots d e daemonroot devant eux. Un vénérable humain armé d'une épée rouillée avait été le seul prêt à se battre, mais il n'y avait aucun honneur à tuer un être aussi âgé. Les vampires se nourrissaient, mais ne s'abaissaient pas à échanger des coups avec ceux qui n'étaient pas dignes de leurs lames. Des guerriers morts-vivants en armure rouillée restaient immobiles tandis que leurs maîtres commençaient à se nourrir des villageois, des zombies se ramassaient dans la boue tandis que les vampires ressuscitaient les nouveaux morts pour grossir leurs rangs. Les chauves-souris volaient bruyamment au-dessus de leur tête tandis que des loups hargneux parcouraient le village sans bruit, à la recherche de ceux qui avaient choisi de se cacher des vampires. Il n'y aurait pas moyen d'échapper à la tuerie. Dans le cimetière entouré de murs, à l'entrée du village, des créatures voûtées se blottissent dans l'ombre, grattant le sol humide. Leur peau pâle et tachetée pendait mollement de leur corps décharné tandis qu'elles déterraient les morts du sol. Une douzaine de ces ignobles goules piochaient furieusement dans la terre, la faim de chair morte et froide motivant leurs efforts. Enfin, le groupe sortit un simple cercueil, le plus grand des démons arrachant le couvercle du cercueil et hurler de triomphe. Des mains griffues se tendirent vers l'intérieur, cherchant désespérément le goût de la viande humaine, mais la plus grande créature grogna et les autres se retirèrent en sifflant. Il s'est introduit dans le cercueil, a arraché le cœur du défunt et a arraché de gros morceaux de viande pourrie des os d u cadavre. Il se précipita vers les murs du cimetière pour dévorer son horrible repas, une faim surnaturelle dans les yeux. La lune émergea de derrière un nuage et la bête dégénérée cligna des yeux sous son éclat impitoyable, remarquant un petit autel couché sur le côté, là où la charge du Dragon de Sang l'avait fait tomber. Il fixa l'autel en évoquant un léger souvenir, comme s i la vue devait lui être familière. Mais le souvenir avait disparu et la bête secoua la tête, mordant profondément dans le cœur froid qu'elle portait et grattant paresseusement la longue cicatrice blanche qui courait de sa tempe droite à son menton.

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